Monsieur le ministre des droits de l’Homme, chargé des relations avec les institutions de la république,
Monsieur le Président de la Commission Nationale des Droits de l’Homme ;
Madame l’ambassadrice, Cheffe de délégation de l’Union Européenne ;
Monsieur le Représentant de l’Organisation Mondiale Contre la Torture (OMCT) ;
Monsieur le représentant du ministre de la sécurité et de la protection civile
Mesdames et messieurs les représentants des corps diplomatiques ;
Monsieur le Directeur Exécutif du CACIT ;
Mesdames et messieurs, représentant des Organisations de la Société Civile ;
Chers journalistes ;
Distingués invités,
Mesdames et Messieurs
Le présent atelier a été annoncé avec l’attente de la Secrétaire d’Etat aux droits de l’Homme pour le discours d’ouverture. Nous savons tous que nous avons un nouveau gouvernement avec un nouveau ministre de tutelle en la personne de M. Christian Trimua.
Nous tenons à saluer la disponibilité et de franche collaboration de la Secrétaire d’Etat sortant Mme Nakpa Polo qui a toujours été à l’écoute de nos préoccupations. Nous savons, pour l’avoir côtoyé sur les questions de l’administration de la justice et de la réconciliation nationale que le nouveau ministre en charge des droits de l’Homme travaillera à renforcer la collaboration avec la société civile en vue de la consolidation de la démocratie et de l’Etat de droit au Togo. Monsieur le Ministre, en entendant de vous revenir avec un document assez conséquent sur nos perceptions et attentes, nous vous souhaitons tout le meilleur dans la charge qui vous a été confiée.
Nous avons pu constater que le gouvernement a mis en place un ministère de tutelle à part entière, montrant, sans doute, sa détermination à renforcer ses actions en valeur de la promotion et de la protection des droits de l’Homme au Togo.
Monsieur le Ministre,
Monsieur le Président,
Excellence,
Distingués invités,
Permettez que je vous raconte une histoire, celle d’une jeune fille mexicaine que vous ne connaissez peut-être pas mais dont, je l’espère, vous garderez le nom à partir de ce jour. Son nom est Claudia MEDINA.
« Le 7 août 2012, à 3 heures du matin, des hommes de la marine mexicaine sont entrés par effraction chez Claudia, à Veracruz et l’ont conduite à la base navale locale où on lui a infligé des décharges électriques avant de la rouer de coups de poing et de pied. On l’a ensuite abandonnée tout l’après-midi en plein soleil, attachée à une chaise.
Le lendemain, Claudia a été transférée au bureau du procureur général de la République, où elle a été accusée d’être membre d’une bande criminelle violente, accusation qu’elle a niée. Elle a été contrainte de signer une déclaration qu’elle n’a pas été autorisée à lire.
Lors de sa comparution officielle, elle est revenue sur cette déclaration et a informé le tribunal du traitement qui lui avait été réservé. Même si la plupart des charges retenues contre Claudia ont été abandonnées, elle demeure inculpée d’une infraction grave : port d’une arme illégale.
Lorsqu’en septembre 2012 Claudia a témoigné au sujet de l’accusation dont elle avait encore à répondre, elle a de nouveau décrit les tortures dont elle avait été victime. Le juge a ordonné d’enquêter sur ces allégations mais, à ce jour, personne n’a eu à rendre de comptes et le bureau du procureur général n’a pas encore effectué d’examen médical et psychologique fondé sur le Protocole d’Istanbul des Nations unies pour recueillir des éléments de preuve des tortures infligées à Claudia. ».
Cette jeune fille victime de torture comme vous le voyez mérite justice, et réparation. Mais à quand ? Des histoires similaires se produisent chaque jour dans le monde, en Afrique et même au Togo. Et sur ce, il faut des hommes avertis, plein de courage, engagés et déterminés comme vous pour faire la prévention et la lutte contre ce crime et mener des actions pour un meilleur suivi de la mise en œuvre de la convention contre la torture.
Grand et réel plaisir qui m’anime ce matin à l’occasion de cette cérémonie d’ouverture de l’atelier de trois (3) jours qui s’inscrit dans le cadre de la consultation nationale que nos organisons en collaboration avec notre partenaire l’OMCT.
Mes remerciements vont tout d’abord au gouvernement togolais pour sa collaboration, ensuite à l’Union Européenne et à l’Organisation Mondiale Contre la Torture (OMCT) pour leur appui financier dans le cadre de l’exécution de cette activité, enfin au ministère des affaires étrangères néerlandais, au gouvernement irlandais et au gouvernement fédéral suisse pour leur appui financier.
Je voudrais également vous remercier chers participants et invités pour votre présence, malgré vos emplois du temps surchargés.
Mesdames et messieurs,
Distingués invités,
Comme vous le savez, la lutte contre la torture reste toujours un défi majeur, pour les organisations de la société civile de par notre action d’accompagnement de l’Etat dans la mise en œuvre de la convention contre la torture. S’il est avéré que depuis 1987 que le Togo a ratifié ce texte, il n’en demeure pas moins qu’à ce jour la lutte contre ce fléau constitue un sujet de préoccupation pour les différents acteurs concerné notamment l’Etat.
Par la présente consultation nationale le CACIT et l’OMCT ont pour objectif entre autre d’évaluer la mise en œuvre de la convention contre la torture depuis la dernière session du CAT, renforcer les capacités des acteurs de la société civile et les journalistes sur les techniques d’élaboration du rapport alternatif et la participation à la session du CAT, partager des informations sur le suivi et la mise en œuvre des recommandations du CAT au Togo, mettre en place une Coalition nationale pour les droits de l’Homme et la lutte contre la torture et renforcer l’engagement des acteurs étatiques et des PTF pour le respect des droits de l’Homme et la lutte contre la torture et les traitements cruels, inhumains ou dégradants.
Sans oublier que dans le cadre du cycle de présentation de rapport des Etats devant le comité contre la torture, la société civile joue un rôle primordial non seulement de veille, mais de dialogue interactif avec le gouvernement pour contribuer à la mise en œuvre de la convention contre la torture.
C’est aussi l’occasion de féliciter le gouvernement togolais pour ses efforts dans la mise en œuvre de certaines observations finales du Comité contre la torture de la session de novembre 2012.
Au titre de ces avancées, l’on note l’adoption le 02 novembre 2015, du nouveau code pénal togolais. Il contient une définition de la torture qui couvre tous les éléments énoncés à l’article 1er de la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, suite à la promulgation de la loi no 2016-027 du 11 octobre 2016 portant modification de la loi no 2015-010 du 24 novembre 2015 portant nouveau Code pénal (article 198 nouveau). L’imprescriptibilité du crime de torture est également prise en compte.
On note également l’adoption de la loi nouvelle loi organique de la Commission Nationale des Droits de l’Homme (CNDH) intégrant le Mécanisme National de Prévention de la Torture le 11 mars 2016.Cette dernière loi marque un signal fort dans le cadre de la prévention de la torture. Car avec cet arsenal juridique la CNDH pourra faire des visites inopinées dans tous les centres de détention sur toute l’étendue du territoire.
A l’évaluation de la mise en œuvre de ces recommandations, il ressort également qu’il y a encore beaucoup de défis, notamment sur l’ouverture des enquêtes suites aux allégations de torture, l’impunité toujours d’actualité dans la mesure où, à ce jour, plusieurs auteurs présumés ne sont nullement inquiétés par la justice. En outre la question des conditions de détention et de détention préventives sont toujours préoccupantes, en dépit de la décongestion de la prison civile de Lomé suite à la construction de la prison civile de Kpalimé. L’effectivité de l’aide juridictionnelle est aussi un des chantiers sur lesquels le gouvernement est attendu pour faire des avancées. Du reste, le renforcement de capacités de forces de l’ordre, militaires reste une préoccupation du fait de la pratique des actes de torture et des traitements cruels, inhumains ou dégradants qui a encore dans notre pays.
Au demeurant, à six mois du nouvel passage du Togo devant le Comité contre la torture, il est plus évident que la société s’organise pour préparer son rapport parallèle. C’est du moins cette démarche qui permettrait aux organisations de la société civile de jouer leur partition dans le cycle de présentation des rapports de l’Etat.
Pour rappel, le CACIT s’est inscrit dans cette démarche en accompagnant la préparation et la soumission de rapports alternatifs aux différents mécanismes de protection des droits de l’Homme. C’est d’ailleurs, en vue de s’assurer de bien remplir cette mission que le CACIT a obtenu le statut d’observateur auprès de la Commission africaine des droits de l’Homme et des peuples et le Statut consultatif auprès du Conseil économique et social des Nations Unies.
Relativement au CAT, des actions de suivi de la mise en œuvre des observations finales ont été faites. On pourra citer la mise en place de l’Initiative Baromètre coordonnée dans le temps par le CACIT en partenariat avec ACAT-Togo, Amnesty International-Togo et UCJG. Des évaluations périodiques avec un rapport sur la mise en œuvre des recommandations urgentes ont été possibles grâce à cette initiative.
Mesdames et messieurs, distingués invités,
C’est vous dire que, ces ateliers serviront de cadre de réunion préparatoire et d’encadrement pour les organisations de la société civile afin de discuter des meilleures stratégies pour s’informer et influencer la mise en œuvre des recommandations. L’accès aux informations et au savoir-faire pertinent des organisations de la société civile permettra d’optimiser leur contribution dans le cadre du processus d’élaboration du rapport et de sa présentation et d’obtenir des recommandations pertinentes sur la prévention de la torture, une meilleure responsabilisation et d’assurer un meilleur plaidoyer.
L’un des outputs de ces travaux, sera le jet des bases pour la création d’une coalition nationale pour les droits de l’Homme et la lutte contre la torture. A terme, ce cadre nous permettra de travailler en synergie pour faire un suivi efficace de la mise en œuvre des engagements de l’Etat relatifs aux droits de l’Homme.
Je profite de cette tribune pour vous informer que le Collectif des Associations Contre l’Impunité au Togo, entend améliorer ses pratiques en matière de documentation de la situation des droits de l’Homme. A cet effet, une plateforme web vent d’être mise en place. Au cours de cette activités, les points focaux, OSC partenaires et le pool de journalistes du CACIT seront initiés sur l’utilisation de cet outil de collecte de données.
A moyen terme, il s’agira, comme susmentionné, de mettre en place une Coalition nationale des droits de l’homme et de lutte contre la torture dont le but sera d’accompagner les actions du gouvernement par la production de rapports objectifs, des renforcements de capacités et des plaidoyers efficaces.
Pour finir, je réitère mes remerciements au gouvernement pour sa collaboration, aux partenaires techniques et financiers pour leur assistance et à mes collègues défenseurs des Droits de l’Homme et aux journalistes pour leur engagement et mobilisation.
Des défis nous attendent et c’est ensemble que nous les relèverons.
Merci pour votre attention
Cet article CONSULTATION NATIONALE DES OSC, JOURNALISTES ET ACTEURS ÉTATIQUES POUR L’EVALUATION DE LA MISE EN ŒUVRE PAR LE GOUVERNEMENT TOGOLAIS DE LA CONVENTION CONTRE LA TORTURE ET AUTRES TRAITEMENTS CRUELS, INHUMAINS ET DÉGRADANTS : Discours du Président du CACIT est apparu en premier sur CACIT.