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La protection des droits de l’Homme au plan sous-régional : une volonté affichée par la CEDEAO

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PHOTO CEDEAONée du traité de Lagos adopté le 28 mai 1975 au Nigéria et entré en vigueur en juin de la même année, la Communauté Economique des Etats de l’Afrique de l’Ouest  (CEDEAO) avait au prime abord un rôle purement économique.Cependant, la difficulté à juguler les déséquilibres et à dégager des réponses adéquates aux moult problèmes soulevés dans la Communauté vont amener les Etats membres de la CEDEAO à accorder une place à l’aspect sécuritaire grâce  à la révision du traité le 24 juillet 1993, entré vigueur le 23 août 1995.

La CEDEAO va vite faire de comprendre aussi que le plaidoyer pour relever le défi d’une intégration réussie ne peut se réaliser sans prise en compte des principes démocratiques qui promeuvent le respect des droits de l’homme.Elle va donc opérer une seconde mutation qui sera la promotion et la protection des droits de l’homme.

Il faut donc constater que c’est récemment que les droits de l’homme sont devenus un objet de la CEDEAO. Le traité initial instituant la CEDEAO dans ses 65 articles ne faisait référence dans aucune de ses dispositions à la notion des droits humains. Ce sont les protocoles de 1985 et de 1986qui vont introduire la notion expressisverbis dans l’ordre juridique communautaire mais de façon timide. C’est dans la Déclaration de Principes politiques de 1991 que la Communauté marque sa forte imprégnation au respect des droits humains, plus fondamentalement son attachement à l’Etat de droit, socle de toute bonne gouvernance. Les Etats membres sont ainsi « déterminés à conjuguer (leurs) efforts en vue de promouvoir la démocratie dans la sous- région sur la base du pluralisme politique et du respect des droits fondamentaux de l’homme tels que contenus dans les instruments internationaux en matière de droits de l’homme universellement reconnus et dans la Charte Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples ». Ces principes fondamentaux auxquels ont adhéré les Chefs d’Etat et de Gouvernement ont été incorporés au Traité révisé de la CEDEAO en 1993. Le Traité révisé fait spécifiquement référence aux droits de l’homme dès son préambule. La Communauté s’engage en effet à faire respecter, à promouvoir et à protéger les droits de l’homme dans chaque Etat membre conformément à la Charte Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples.

Néanmoins, aussi résolument tournée vers une adaptation progressive aux exigences du moment, le cantonnement de l’organisation au discours incantatoire ne serait qu’une politique mal amorcée. Pour jauger l’efficacité de ces principes désormais consacrés dans le traité, l’organisation sous-régionale doit être dotée d’une institution autonome à caractère juridictionnel qui veillera au respect et à l’application des normes protectrices des droits de l’Homme.C’est à ce titre que la CEDEAO avec l’adoption du Protocole A/SP.1/01/05 du 19 Janvier 2005 a donné compétence à sa juridiction, dénommée Cour de justice de la CEDEAO et basée à Abuja, de connaitre des cas de violation des droits de l’homme.

Depuis la grande réforme qui a élargi le champ de compétence de la Cour d’Abuja, les citoyens ouest africains, victimes de violations de droits humains de la part d’un Etat membre de la Communauté, peuvent désormais accéder au prétoire du juge communautaire.

Sur le plan théorique, l’introduction de ce nouveau chef de compétence dans le contentieux juridictionnel de la CJ CEDEAO relatif aux droits humains est indéniablement un fait nouveau dans la société internationale et diffère cette cour des autres institutions classiques. La CJ CEDEAO est la seule juridiction d’une organisation internationale à vocation économique qui a reçu un mandat explicite pour se prononcer sur des cas de violation des droits de l’homme et ce, sans épuisement des voies de recours internes. La possibilité donnée aux particuliers de saisir directement cette cour sans au préalable que le litige ne soit porté devant le juge national, permet de résoudre le problème du difficile accès à la justice au plan national.

L’autre spécificité est relative à ses instruments de référence. Saisi d’un différend relatif aux droits de l’homme, le juge communautaire travaille sur des bases textuelles hétérogènes. A ce titre, le requérant peut invoquer des instruments universels et régionaux protecteurs des droits de l’homme tels que la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme, les deux Pactes de 1966 et la Charte Africaine des Droits de l’Homme et du Peuple.

Sur le plan institutionnel, la Cour, en tant qu’organe judicaire ne se limite pas à l’interprétation et l’application des textes de l’organisation ;elle arrive à se prononcer sur un contentieux réservé traditionnellement à des juridictions spécialisées.  La compétence de la Cour en matière de protection des droits de l’homme ne saurait dès lors être assimilé à‘’un effet de mode’’. Elle correspond, plutôt, à la volonté affichée par la Communauté ouest africaine d’assainir le cadre sous-régional par la garantie juridictionnelle des droits de l’homme, prélude à une intégration aboutie.

 

Josiane GNANDE

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